Les 80 ans du « pape » des historiens
Le « pape » des historiens, Fernand Braudel, vient de fêter ses quatre-vingts ans. A cette occasion il a bien voulu évoquer pour nous sa vie, son métier, ses passions et l'œuvre à laquelle il travaille actuellement, une « Histoire de France » en trois volumes. « Il y en a qui découvrent l'Amérique, dit-il, moi je m'amuse à découvrir la France. » Un entretien exceptionnel et attachant.
L'HISTOIRE : Monsieur Braudel, à dix-huit ans de l'an 2000, comment vous apparaît la fonction d'historien dans ce proche futur ? Est-ce au moins une question que vous vous posez ?
FERNAND BRAUDEL : Je ne doute pas que le métier d'historien soit encore bien en place en l'an 2000. Je ne dis pas qu'il aura l'audience qu'il peut avoir momentanément et de façon extravagante dans la France, l'Europe et le monde occidental d'aujourd'hui. Jamais l'histoire n'a eu cette ampleur, cette importance, cet impact. On s'est aperçu qu'aucune société ne met en lumière son identité, sa vérité actuelle, sans avoir éclairé son passé en profondeur. Je ne parle pas de l'histoire traditionnelle, celle des rois, des batailles et des traités, mais de celle qui s'acharne à une recherche massive du passé.