« Dressed as a girl »

Derrière le « drag », cet art qui se joue des codes du genre, se cachent différentes performances, à la fois frivoles et graves.

Le drag est un « doigt d'honneur très glamour à la société », dixit Nicky Doll, la plus médiatique des queens françaises actuelles. Quelle histoire se cache derrière ce mot, drag ? A-t-il toujours été polymorphe et politique ? Contraction de dressed as a girl (« habillé en femme ») ou issu du verbe to drag (« traîner »), en référence aux longues robes portées, le terme est ancien. Celui de « drag queen », lui, apparaît après les années 1990. Il désigne un art de la transformation qui consiste à se jouer du genre, dont on pourrait faire remonter les racines à des périodes beaucoup plus anciennes si l'on considère seulement la pratique, pour des hommes, de s'habiller en femme.

Du rire au politique

Au Ve siècle av. n. è. déjà dans le théâtre grec, les rôles féminins sont tenus par des hommes ; les shakespeariens préféreront les androgynes et le théâtre japonais du kabuki fait de même pour tenir les femmes éloignées des planches. Ce travestissement « pour rire », sans conscience politique, a toujours existé, preuve en est les vaudevilles américains des années 1920 jusqu'au célébrissime Madame Doubtfire (1993).

Mais l'histoire du drag a un autre versant, éminemment politique, intimement lié à la longue histoire des luttes LGBT+. Les historiens le font remonter aux années 1880-1890, aux États-Unis, quand William Dorcey Swann, un ancien esclave, organise des bals où les hommes s'habillent en femmes. Il se désigne comme « la reine du drag » (« the queen of drag »). Le documentaire plonge dans les lieux qui ont, depuis, porté l'activisme queer (le mot signifie « bizarre », récupéré pour désigner la communauté LGBT+), à Paris et à Versailles (où le frère de Louis XIV, « Monsieur », est connu pour son travestissement), à Londres (où les molly houses constituent des lieux de rencontre jusqu'en 1861), mais aussi à New York et à Berlin. Il s'agit là d'exister, de se montrer, de déranger, de danser ou chanter, d'éduquer - au choix ou tout à la fois, qu'on se dise créature, travesti ou drag-queen. Le documentaire sera diffusé le 17 mai, journée mondiale de lutte contre les LGBTphobies. Pour Pascal Petit, le réalisateur : « C'est une manière de rendre justice à tous ces personnages qui ont fait avancer les droits sans qu'on le sache. »

À VOIR

Sous les paillettes, la rage. Une histoire du drag, Pascal Petit, le samedi 17 mai à 20 h 50 sur Histoire TV.

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